Paris 2024 : ouvrons grand les Jeux sur l’écologie

 Les Jeux Olympiques, qui se sont déroulés en France du 26 juillet au 11 août dernier, ne dérogent pas à la règle des polémiques écologiques entourant l’évènement olympique. Avec des conséquences très négatives pour l’environnement sur le long terme, que ce soit à Athènes ou Rio par exemple, peut-on encore, aujourd’hui, organiser des compétitions internationales de premier plan, sans aggraver la situation écologique déjà très fragilisée ?

A Paris, place de la concorde une Arena totalement temporaire pour le Skate, le Basket 3X3 et BMX (Photo Le Hublot)

Un objectif de décarbonation ambitieux

Dés le départ, les objectifs de la France pour réduire l’impact écologique dans les compétitions sportives étaient colossaux. A l’origine, les Jeux étaient même initialement prévus pour être à « contribution positive » : en clair, Paris 2024 assurait de faire mieux que les précédents pays hôtes en compensant plus de carbone que l’évènement ne devait en produire. Mais cet objectif, impossible à atteindre, a été assez vite revu à la baisse : dès 2021, les JO de Paris ne promettaient plus qu’une neutralité carbone, ce qui était quand même remarquable et historique, avec un budget carbone annoncé à 1,5 million de tonnes de CO². En effet, c’était déjà nouveau que de se fixer à l’avance un tel objectif mais c’était surtout une estimation relativement basse par rapport aux 3,6 millions de tonnes de CO²de Rio en 2016. Dans notre région des Hauts de France, la MEL, Métropole Européenne de Lille, et le COJO avaient signé une convention visant à effectuer des Jeux durables et inclusifs.

 Des choix forts dans de nombreux domaines

Paris 2024 a voulu ainsi montrer qu’un grand événement sportif pouvait être plus responsable et plus utile aux habitants. Du point de vue des infrastructures, 95 % existaient déjà à l’échelle nationale et seules deux nouvelles structures ont été construites dans la région parisienne : l’Arena Porte de la Chapelle et le Centre Aquatique Olympique de Saint-Denis, qui continueront d’accueillir des événements après les JO. Les structures temporaires, elles, ont été démontées après les Jeux pour éviter qu’elles ne deviennent des bâtiments inutilisés, les fameux éléphants blancs qui gangrènent Rio par exemple. 

Mais le village des athlètes de Saint-Denis, lui, n’a pas disparu après la compétition. Dès l’été 2025, il accueillera 6 000 habitants, des familles, des étudiants et des jeunes actifs. Les logements seront transformés et le quartier comprendra des commerces, des bureaux, des équipements publics avec 9 000 arbres et arbustes. La construction a été pensée pour limiter l’empreinte carbone, avec l’utilisation de matériaux biosourcés comme le bois et des systèmes économes en énergie, grâce à la géothermie et aux panneaux solaires.

Pendant les JO, d’autres mesures fortes ont été adoptées : tous les sites olympiques étaient accessibles sans voiture, grâce aux transports en commun, aux pistes cyclables et aux cheminements pour piétons, une première dans l’histoire des Jeux. Les organisateurs ont aussi cherché à réduire les déchets : les sommiers des athlètes, fabriqués en carton, ont été conçus pour être entièrement recyclés après les Jeux, les autres meubles du village olympique ayant été récupérés et revendus à bas prix par Emmaüs. Coté emballages, les plastiques à usage unique ont été bannis. La restauration des athlètes misait, elle, sur des produits locaux et proposait davantage d’options végétales, tout en réduisant le gaspillage grâce à la redistribution des surplus alimentaires aux associations.

Les hautes exigences écologiques régionales

Les engagements écologiques ne se sont pas arrêtés à l’échelle nationale et se sont concrétisés dans notre région avec des centres d’accueil déjà existants, en adéquation avec la vision d’un avenir plus durable. Nous avons interviewé Antoine Sillani, vice-président en charge des sports, de la jeunesse et de la vie associative à la région Haut-de-France : « on a exigé qu’il y ait cette notion de réduction d’empreinte carbone et de développement durable pour déclencher le financement de la région ». Il a ainsi insisté sur le fait que, même si la Région n’était pas une organisatrice directe, elle a joué un rôle dans l’accueil et la préparation des athlètes en recensant les centres de préparation déjà existants et répondant à la démarche REV3 (troisième révolution industrielle). L’objectif était de rendre réellement les infrastructures plus durables. Ainsi, à Lille qui accueillait les épreuves de handball et de basket, les deux résidences hébergeant les athlètes ont été transformées en logements étudiants dès la rentrée 2024. L’une est destinée aux étudiants de la métropole, l’autre à un espace de co-living. De plus, comme s’en réjouit Antoine Sillani, « les transports en commun et les plans de déplacement ont été pensés » : le réseau Ilévia a permis de transporter 370 000 spectateurs, réduisant ainsi considérablement l’usage de la voiture. De nouvelles stations de vélos et des bornes de recharge pour véhicules électriques ont été également installées pour encourager des déplacements plus durables et la connexion avec le réseau TGV a été renforcée pour faciliter les trajets à l’échelle nationale.

A Villeneuve d’Ascq, Olympium, ancien village des athlètes olympiques de basket et de hand est devenu en septembre dernier une superbe résidente étudiante. (Photo autorisation La Voix du Nord)

Plus vite sans doute…mais pas toujours plus fort en termes d’écologie     

    Cependant, certaines actions ont quand même fait débat comme l’utilisation des écocups par Coca-Cola qu’on pouvait vraiment considérer comme du green-washing (éco-blanchiment) puisque les boissons versées étaient, en réalité, transportées en amont dans de nombreuses bouteilles plastique non recyclable.  Emma Dumont, bénévole des JO au stade de France témoigne : « Il y avait plein de bouteilles en plastique donc hyper contradictoire avec leur histoire de gobelet. […] ils vident des canettes dans des verres, ce n’est pas hyper logique, je trouve ». Mais c’est le transport aérien qui restera l’une des plus grosses causes de l’empreinte carbone avec 13 millions de spectateurs se déplaçant principalement en avion et aussi des délégations et des célébrités utilisant des vols privés et donc très polluants. Emma témoigne de nouveau : « Les délégations arrivaient toutes en avion avec des vols quasi vides où il n’y avait qu’eux. Ils se déplaçaient tous en taxi, avec plein de voitures ». Evénement planétaire sans doute, les JO peuvent-ils être bons pour la planète ?  

Une vasque olympique conçue pour être écologique, composée d’un nuage d’eau et de 40 projecteurs LED (Photo Le Hublot)

Paris 2024 restera gravé dans les esprits pour ses prouesses sportives, son engouement national et sa dimension festive mais aussi pour une amélioration considérable de la durabilité à laquelle les différentes collectivités et organisations tenaient tant. Le bilan carbone dévoilé après coup montre qu’il dépasse un peu les prévisions (1,59 millions de tonnes de CO2), mais reste quand même très honorable puisqu’il est deux fois plus bas que les moyennes de Londres 2012 et de Rio 2016. Des JO certes pas parfaits écologiquement, mais sans éléphants blancs !

Elisa Duthoit, Amira Kaloun, Corentin Saint-Antoine et Emilien Wiart

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