Là, où tout a commencé
Grandes caisses métalliques permettant de transporter différentes marchandises sur des bateaux cargos, ces aventuriers de la mer font un long périple tout autour du globe avant de prendre leur retraite. Même si tous les conteneurs ne sont pas recyclables (broyés quand ils sont endommagés ou dangereux pour l’homme s’ils ont transporté des produits chimiques), les autres sont lavés, testés et enfin remis sur le marché. Utilisés différemment selon les entreprises, certains ont une seconde vie et sont recyclés en nouveaux conteneurs comme chez Véolia ; dans les environs de Paris, à Saint-Pathus, la société Safestock les transforment en box de stockage pour des particuliers. Mais depuis les années 2000, ils ont aussi une autre fonction : en effet, l’architecte Eric Reynolds a eu l’idée de les réhabiliter en les transformant en habitat, à Londres, avec son « Conteneur City » ; on en retrouve aussi à Amsterdam dès 2003 sur un campus étudiant et puis dans le monde entier.
Une solution qui résout plusieurs problèmes
Face à la pénurie de sable utilisé pour la fabrication du béton et du verre dans la construction traditionnelle, les conteneurs peuvent effectivement constituer une solution écologique mais aussi économique. A cause de l’inflation et de la pauvreté grandissante, les moins aisés pourraient devenir propriétaires puisque le prix d’un conteneur en réhabilitation est beaucoup moins élevé que celui d’une maison traditionnelle : il faut compter entre 1 500 euros à 4000 euros brut pour un conteneur de Dry de 29,7 mètres carrés contre 1 400 €/mètre carré pour une maison traditionnelle. 88% moins chers, ils ont une durée de vie estimée à 40 ans. La construction d’un conteneur en réhabilitation permet un gain de temps de 70 % par rapport à une maison traditionnelle et cela peut constituer une architecture intéressante en cas de séisme : très robustes puisqu’ils voyageaient dans des condittions extrêmes sur les mers sans subir de dommages, ils n’ont pas de problèmes de fissures qu’on peut rencontrer dans les maisons traditionnelles notamment avec le réchauffement climatique. Puis, comme une partie de la construction se fait à un seul et même endroit, les déplacements et la pollution qu’ils engendrent, sont également limités. On trouve aussi moins d’outils, de véhicules et d’équipements de travaux sur ces chantiers qui seront moins imposants et donc moins gênants. Enfin, un conteneur peut être aussi être esthétique, vu de l’extérieur.
Ainsi, la ville du Havre a créé une résidence universitaire sur ses docks : 100 conteneurs ont été ainsi empilés, et si l’extérieur des boîtes a été laissé tel quel pour se fondre dans le paysage local, l’intérieur a été aménagé en appartements de 24 mètres carrés, équipés d’eau, d’électricité et d’un accès à Internet. De même, dans le département du Nord, à Cambrai, Clésence, une entreprise sociale pour l’habitat des Hauts-De-France, a construit en 2022 une résidence sociale de 15 logements entièrement composée de conteneurs maritimes recyclés, destinée à des personnes isolées ou en situation de handicap sans critère d’âge ; l’un de ses responsables, Logan Cardon nous a expliqué que pour un loyer mensuel de 250 euros le gestionnaire reversait 80 % du loyer à Clésence et gardait 20 % pour assurer le suivi des habitants. Une solution durable à tous les sens du terme.
Evidemment tout n’est pas parfait
Toutefois la maison conteneur comporte des défauts comme par exemple, l’espace réduit ou la durée de vie limitée : elle dure 40 ans, donc moins longtemps qu’une maison classique qui peut résister plus de 100 ans. On peut aussi penser à l’isolation. En effet, les matériaux utilisés pour construire les conteneurs, tels que l’acier et le métal, ne sont pas connus pour leurs qualités isolantes. Ainsi, il peut être difficile de maintenir une température convenable à l’intérieur d’une maison conteneur sans un système d’isolation efficace. Le projet est donc coûteux et l’espace intérieur disponible encore plus réduit, puisque l’épaisseur de l’isolation doit être prise en compte dans la conception. Comme pour toute maison, l’entretien est essentiel pour prolonger la durée de vie de la structure en acier. Les conteneurs peuvent rouiller s’ils ne sont pas correctement entretenus, ce qui nécessite des travaux réguliers de peinture et de protection contre la corrosion. Enfin, le conteneur est limité en termes de formes puisqu’on ne peut pas faire de formes arrondies.
Pourtant, nous trouvons la solution intéressante. D’une part elle permet de remplacer les habitations qui sont faites de différents matériaux non renouvelables ou qui mettent très longtemps à se renouveler comme le sable. D’autre part, les conteneurs transformés en logements sont plus rapides et plus simples à assembler et permettent de gagner beaucoup de temps par rapport à la construction des habitations maisons traditionnelles. Enfin, outre le fait de donner une seconde vie à des objets, elle permet également de répondre aux besoins de ceux qui n’ont pas les moyens de s’acheter un domicile traditionnel.
La rencontre avec un passionné
A Cambrai, nous avons rencontré Benoît Contant, professeur d’arts plastiques au collège Lamartine depuis 15 ans qui a fait des études d’architecture et qui s’intéresse depuis longtemps aux conteneurs, un sujet de réflexion qu’il soumet d’ailleurs régulièrement à ses élèves. Il nous explique qu’on peut assembler les conteneurs comme on le souhaite en faisant appel à des professionnels pour souder les pièces entre elles mais également pour souder les parois ou solidifier la structure qui se fragilise à cause des ouvertures. Il nous explique qu’il faut faire attention à ce qu’il ne fasse pas trop chaud dans le conteneur à cause de la structure en acier qui conserve la chaleur : pour l’isolation, il suggère l’utilisation de la laine de verre ou du chanvre recouvert de placo ; pour l’extérieur, il propose de repeindre le toit en blanc afin de réfléchir les rayons du soleil. Il nous rappelle qu’il est essentiel d’entretenir son conteneur au fil des années puisque sa durée de vie varie en fonction de l’entretien. Le professeur insiste sur l’emploi de peinture spécialisée qui permettra de conserver le métal en bon état plus longtemps.
Anaïs Bruyère, Noeline Leconte
Sources
- Marine Richard, « Ces anciens conteneurs mari1mes vont accueillir des personnes à mobilité réduite », Le Figaro immobilier, 27 décembre 2022
- Douglas Shepherd, « Saint-Pathus : des conteneurs mari1mes recyclés en box de stockage », La Marne, 29 avril 2022
- B3 Ecodesign, « Et si vous en appreniez un peu plus sur l’histoire des maisons containers ? », Blog de B3 Ecodesing, 14 septembre 2024
- JDK Concept, « Les inconvénients d’une maison container : ce qu’il faut savoir »
https://jdk-concept.com/les-inconvenients-dune-maison-container-ce-quil-faut-savoir/
- Inspire Box, « Réhabilita1on d’un entrepôt avec 42 containers », 17 juin 2020
https://inspirebox.fr/rehabilitation-d-un-entrepot-avec-42-containers/
- Pierre Dominguez, « Un container comme logement : décryptage d’une tendance », Greenkub, 29 décembre 2023
https://www.greenkub.fr/container-logement-tendance
- LODJ, «Vivre dans une maison container, tout ce que vous devez savoir», 9 mars 2022