Se défaire des affaires à faire…

Et si on évoquait le dernier jean à la mode que vous venez d’acheter ? Oui, oui celui-là. C’est 11 000 litres d’eau pour sa fabrication, soit l’équivalent de 285 douches ou même de 40 ans d’eau potable pour une personne. Le saviez-vous ? Sans parler du nombre de kilomètres qu’il a parcourus pour venir jusqu’à vous…La consommation de vêtements est donc un problème qui coûte de plus en plus cher, que ce soit à la planète ou à la société. Mais nous en sommes convaincus, il est possible de faire autrement…

 

Pas cher ou durable, quels vêtements choisir ?
(photo Lucie Morelle et montage Anaelle Gaillard)

Des habits pas chers qui nous coûtent toujours plus…

Une affaire à ne pas rater par SMS, une promo alléchante par mail, les marques bombardent le consommateur et rivalisent d’imagination pour le faire craquer. La fast fashion bat son plein : pour les marques, il s’agit de renouveler leurs collections très souvent. Influenceurs et réseaux sociaux poussent à l’ultra-consommation. Mais si les habits sont de moins en moins chers, ils ont malgré tout un coût énorme…pour la planète !

62% de la consommation textile mondiale sont composés de fibres synthétiques, peu chères et faciles d’entretien.  Et cela a un impact sur notre environnement car il s’agit le plus souvent de dérivés pétroliers. Mieux vaut vraiment alors se tourner vers des alternatives plus éco-responsables comme le coton ou le lin bio…et pourtant, c’est aussi compliqué puisque leur culture est fortement consommatrice d’eau. En effet, selon la Fondation Ellen MacArthur, ce sont 93 milliards de mètres cubes d’eau qui sont employés par l’industrie textile chaque année dans le monde, soit 4% de l’eau potable disponible. Le coton est la fibre naturelle la plus utilisée au monde :  mais pour en produire un kilo, il faut entre 5 000 et 17 000 litres d’eau.  Ainsi la mer d’Aral a perdu les 3/4 de sa surface, puisque son eau sert massivement à l’irrigation du coton en Asie centrale. Et, selon l’ADEME (Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie) 20% de la pollution des eaux dans le monde ne serait due qu’aux teintures de l’industrie du textile, ce qui fragilise les écosystèmes aquatiques. Coté gaz à effet de serre, l’ADEME estime que l’industrie du textile au sens large émet environ 4 milliards de tonnes de CO2 par an en 2022 soit environ 7 % du total.  Comme le disent les responsables de la marque de vêtement bio Ogarun dans le nord de la France : « Il n’existe aucun produit manufacturé dont l’impact environnemental est nul. » 

 

Fast fashion et délocalisation 

Coté impact social, là aussi les problèmes sont nombreux. La fast fashion repose sur la vente rapide de vêtements à bas prix. Et pour cela, les grandes marques se sont délocalisées et fabriquent dans des pays où les coûts sont les plus bas. Il en résulte à la fois des milliers de kilomètres parcourus (jusqu’à 65 000 kms parcouru pour un seul jean) et donc une empreinte carbone considérable mais aussi des conditions sociales dramatiques : la main-d’œuvre, dans ces pays producteurs souvent éloignés de nos normes sociales, est sous-payée et travaille bien au-delà des horaires fixés par l’Organisation internationale du travail.  En 2013, l’effondrement de l’immeuble du Rana Plaza à Dacca au Bangladesh a attiré le regard du monde entier sur ces pratiques : 1100 ouvriers tués dans ce bâtiment vétuste qui fabriquaient des vêtements dans des conditions matérielles sordides. La fast fashion a aussi du sang sur les mains…

 

 

Et si on faisait autrement…

L’ère Vintage, cette friperie est ouverte au 12 des ratelôts à Cambrai depuis mai 2022 (photo Anaelle Gaillard)

L’une des premières solutions à la surconsommation vestimentaire c’est la friperie ! Éviter d’acheter du neuf et réutiliser. Amandine Sutra, qui tient la friperie « l’Ère vintage » à Cambrai, évoque les articles qu’elle reçoit quotidiennement. Elle s’est spécialisée dans le style vintage puisqu’il dure davantage dans le temps, contrairement à un article de Primark ou Shein. Elle reçoit des vêtements provenant de dons ou de fournisseurs belges par exemple (le coût carbone du transport reste bien limité). Avant de les vendre, elle les nettoie et s’il y a des invendus, elle en fait don à des associations ou elle les met sur Leboncoin.

Nous nous sommes aussi rendues dans un entrepôt du Relais à St-Hilaire-lez-Cambrai. Les vêtements ici proviennent d’invendus de marques ou de don des personnes. 5600 tonnes environ de vêtements d’occasion y sont triés chaque année selon Dominique Koperski, directeur adjoint du lieu. Dans l’usine, peu de machines, ce sont surtout des personnes qui trient. Dans ses 85 boutiques Ding Fring, le Relais revend les vêtements de très bonne qualité à des prix largement abordables, à quelques euros l’unité.

 

Un point de collecte de vêtements usagers du Relais dans une commune du Cambrésis à Haussy (photo Anaelle Gaillard)

De nombreuses applications permettent aussi de mettre en vente en ligne les vêtements ou objets dont on ne veut plus :  le fonctionnement des sites d’occasion comme Leboncoin ou Vinted est d’ailleurs très simple.

Et puis si on tient à acheter neuf, on peut se tourner vers la mode éthique, ou « durable », fondée sur un principe très simple : proposer aux consommateurs des produits de qualité avec une plus grande durée de vie et qui prend en compte les problèmes environnementaux et sociaux.  Cela peut passer par l’achat de vêtement produits localement pour favoriser le circuit court et réduire ainsi l’empreinte carbone. On peut peut-être envisager les vêtements bio, fabriqués à partir de matières premières produites conformément aux règles de l’agriculture biologique sans produits chimiques ni pesticides. Et sinon, on peut envisager le fait maison : un gilet en tricot ou une robe fraîchement cousue et le tour est joué. Même si tout le monde ne dispose pas du savoir-faire, il est très facile de trouver de nombreux tutos sur YouTube

En opposition à la fast fashion, la « slow fashion » est un mouvement qui permet de mettre en avant une fabrication de vêtements convenables dans le respect de l’environnement, des travailleurs et des animaux. C’est une alternative à la fast fashion qui vise à limiter ses achats vestimentaires pour consommer moins mais mieux.

 Alors, et si on essayait autre chose ? En tout cas maintenant vous ne pourrez plus dire que vous ne saviez pas la prochaine fois qu’on vous proposera d’entrer à Primark…

 

Anaelle Gaillard, Eva Guilbaud et Lucie Morelle

 

Sources

« Le revers de mon look : Quels impacts ont mes vêtements sur la planète ?» Agir pour la transition écologique, agirpourlatransition.ademe.fr/acteurs-education/enseigner/revers-mon-look-impacts-vetements-planete.

Wakim, Nabil. « “Face à la pollution de l’industrie textile, il faut acheter le moins de vêtements possible” » . Le Monde.fr, 24 novembre 2022, www.lemonde.fr/idees/article/2022/11/17/face-a-la-pollution-de-l-industrie-textile-il-faut-acheter-le-moins-de-vetements-possible_6150371_3232.html.

Desmonceaux, Juliette. « CO2, eau, microplastique : la mode est l’une des industries les plus polluantes du monde » . Le Monde.fr, 2 septembre 2019, www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2019/09/01/co2-eau-microplastique-la-mode-est-l-une-des-industries-les-plus-polluantes-du-monde_5505091_4355770.html.

« Comment réduire l’impact environnemental de vos vêtements ». Happy new green, 11 mai 2020, www.happynewgreen.com/comment-reduire-limpact-environnemental-de-vos-vetements.

Obé, Benjamin Giboudaud-Louise. La mode sans dessus-dessous. multimedia.ademe.fr/infographies/infographie-mode-qqf.

Laurie. « L& # 8217 ; empreinte eau : on décode pour vous !  » Eau’Dyssée, 26 octobre 2021, www.eaudyssee.org/empreinte-eau-explications.

Garric, Audrey. « Les émissions mondiales de CO₂ restent à des niveaux record cette année ». Le Monde.fr, 11 novembre 2022, www.lemonde.fr/climat/article/2022/11/11/les-emissions-mondiales-de-co2-restent-a-des-niveaux-record-cette-annee_6149409_1652612.html#:~:text=Cette%20%C3%A9tude%20pr%C3%A9voit%20que%20les,1%20%25%20par%20rapport%20%C3%A0%202021.

Id, Rédaction. « Mode : comment s’habiller éthique sans se ruiner ? » ID, l’Info Durable, 23 février 2023, www.linfodurable.fr/conso/mode-comment-shabiller-ethique-sans-se-ruiner-36980.

Jacoberger-Lavoué, Virginie. « La relocalisation du textile en France gagne du terrain ». Les Echos, 7 avril 2022, www.lesechos.fr/industrie-services/mode-luxe/la-relocalisation-du-textile-en-france-gagne-du-terrain-1398961.

Amandine. « Fabrication locale : Tout ce qu&rsquo ; il faut savoir ». Lemahieu, 15 avril 2022, www.lemahieu.com/blog/fabrication-locale-tout-ce-quil-faut-savoir.

Reporterre. « Record historique pour les émissions de CO2 en 2022 » . Reporterre, le média de l’écologie, 3 mars 2023, reporterre.net/BRV-Record-historique-pour-les-emissions-de-CO2-en-2022.

Sites 

https://nosgestesclimat.fr/

https://www.thegoodgoods.fr/

https://www.wedressfair.fr/

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