La mer d’Aral, une mer sans eau ?
La mer d’Aral se situe en Asie, au nord du Kazakhstan et au sud de l’Ouzbékistan. Mer à l’origine, elle est aujourd’hui considérée comme le 4ème plus grand lac du monde. Elle est alimentée par deux grands fleuves, le Syr-Daria et l’Amou-Daria dont les eaux proviennent des glaciers des montagnes du Pamir, voisines de l’Himalaya.
A gauche, la mer d’Aral en août 2000, déjà réduite à une fraction de ce qu’elle était en 1960 (bordure noire). A droite en août 2014, la partie sud a disparu. Photo Nasa Earth Observatory citée dans National Geographic. |
Cette mer a une histoire : en 1960, elle couvrait 68000km2 et était la quatrième surface d’eau salée intérieure du monde. A cette époque, située en URSS, Moscou décide de lancer un programme d’irrigation massive : le Syr-Daria, notamment, est utilisé par les Soviétiques pour irriguer des champs de coton, plus rentables que le poisson.
Dans les années 1980, cette mer a diminué en superficie des deux tiers, sa salinité est triplée, le secteur de la pêche a disparu. En revanche, la surface irriguée dans la région environnante a doublé. La mer d’Aral a donc perdu près de 75% de son eau : on retrouve même des « bateaux fantômes » des bateaux abandonnés ou échoués. Les images satellites ne nous montrent déjà à cette époque que de petites étendues d’eau dispersées.
Lutter contre la disparition
Face à cette situation, en 1993, Nicolas Aladine, un scientifique Russe convainc un gouverneur, Kazakh de construire une digue rudimentaire pour garder une partie de l’eau du Syr-Daria dans le Nord de l’Aral. Le résultat est que, la salinité baissant, certains poissons reviennent. La Banque mondiale finance la construction d’une digue plus solide en terre et d’une écluse en béton de 13kms. Grâce à la construction du barrage de Kokaral, le port d’Aralsk au Kazakhstan qui s’était retrouvé à 100 km de la mer, n’est plus qu’à 25 km : à cette époque , on estime que l’eau pourrait revenir en 6 ans.
En 2000, les observations satellites nous montrent deux étendues d’eau importantes séparées, l’une au Nord, au Kazakhstan, et l’autre au sud, en Ouzbékistan.
Avec la construction de la digue de Kokaral dans la partie Nord de la Mer d’Aral, l’eau revenue, on assiste à une restauration de l’écosystème original. La quantité de poisson péché est même de 2000 tonnes en 2007 avec près d’une vingtaine d’espèces de poissons et c’est toute une économie autour du poisson qui est restaurée : des usines de transformation ont permis de créer des emplois.
Mais les observations les plus récentes datant de 2014 nous ont appris que la partie sud de l’ancienne Mer d’Aral avait presque totalement disparu à cause de l’irrigation des cultures de coton, mais aussi des épisodes de sécheresse de plus en plus nombreux ; les effets du changement climatique se traduisent par moins de pluies dans la région et moins de neige sur le massif du Pamir, et donc moins d’eau issue de la fonte.
Des populations menacées
Aujourd’hui, 67 millions de personnes qui peuplent ce bassin de la mer d’Aral sont victimes de maladies liées à la libération dans l’air de tous les pesticides (liés à la culture du coton) qui s’étaient accumulés au fond de la mer aujourd’hui asséchée. Les poussières polluantes transportées par les vents provoquent une forte mortalité infantile et un taux élevé de cancers.
Pour que la mer d’Aral récupère la superficie qu’elle avait autrefois, il aurait fallu que l’apport en eau par le Syr-Daria et l’Amou-Daria soit quadruplé. Pour ce faire il aurait fallu restreindre l’irrigation du coton très consommatrice d’eau. Face à des populations croissantes, les cinq anciennes républiques soviétiques de la région n’ont pas fait ce choix, ne voulant pas renoncer à leurs exportations de coton qui leur ramènent des bénéfices.
Des actions sont aujourd’hui réalisées au sud à l’échelle locale pour mieux gérer les usages hydrauliques et créer des retenues pour stocker une partie des écoulements des cours d’eau lors des crues. Depuis les oiseaux migrateurs et les pêcheurs reviennent. Ces actions sont très utiles et durables pour les populations locales. Mais aussi pour la biodiversité et l’écosystème.
L’ONU a également débloqué en octobre 2014, 3 milliards de dollars pour aider les populations à se protéger des effets de l’assèchement
La mer d’Aral a disparu, elle ne sera jamais plus ce qu’elle a été. Il n’en reste qu’un lac salé au Nord. Cet assèchement est une des plus importantes catastrophes environnementales due à l’action humaine du 20e siècle.
Léa Gerbandier et Brittany Issartel